Face à la répression et à la désinformation, réveiller l’espoir médiatique malgache

Communiqué

à l’occasion de la journée mondiale de la liberté de la presse

La régression dangereuse de la liberté de la presse, à Madagascar, selon les chiffres avancés par Reporters Sans Frontières (RSF), est nette : du 100e rang en 2024 au 113e en 2025. Symptomatique d’une crise des médias distendue et enracinée dans l’absence de recettes économiques, prise entre musellement politique et juridique, et désinformation massive ; ce déclin alarmant est le fruit de causes structurelles.

La situation délicate de la dimension économique des médias, jamais aussi mal en point dans les statistiques de RSF, peut malheureusement expliquer en partie le constat. A Madagascar, d’une part, l’absence de fonds publics en faveur des médias condamne les rédactions à subir les aléas d’une précarité qui favorise l’auto-censure qui ne dit pas son nom. D’autre part, les dispositifs législatifs liés à la diffamation et toutes mesures restrictives sont autant de boucliers qui stérilisent la liberté d’expression : journalistes menacés, manifestations interdites et policièrement dispersées… Ce climat de terreur marginalise une quête de professionnalisme, surtout dans les affaires dites “sensibles”. 

Par ailleurs, la montée en puissance des réseaux sociaux, et de Facebook tout particulièrement, rend le public indigent et perméable aux rumeurs et fake news. Cela met à mal le débat public, mais ces initiatives sont autant de démonstrations que le numérique peut aussi servir la démocratie, grâce à l’équipement outillant journalistes et citoyens pour les vérifications et le plaidoyer ; un long chemin à faire, si la volonté politique s’y prête.

Des leviers pour renverser la vapeur 

La presse malgache subit indéniablement une pression croissante, traduisant une crise de gouvernance de l’information et un affaiblissement des mécanismes institutionnels de soutien. Des solutions concrètes et immédiates peuvent toutefois être envisagées ; et en ce 03 mai, nous proposerons de :

– Légiférer sur l’accès à l’information : il faut sans tarder un droit d’accès aux documents publics, qui doit décharger les journalistes du risque judiciaire.

– Éduquer aux médias le plus tôt possible : introduire des modules de pensée critique, notamment dans les écoles, pour faire émerger une génération de citoyens éclairés.

– Renforcer la formation continue : réactualiser la formation des journalistes en créant des ponts ONG/universités/réseaux régionaux et continentaux, etc., pour mieux fournir aux journalistes les outils pour aborder les questions de citoyenneté et de démocratie.

– Accroître le soutien aux radios communautaires, qui font le lien entre les zones rurales et les localités éclatées. Ces médias sont des acteurs de la participation citoyenne, dans une écologie médiatique pluraliste.

Refus de la résignation, renouveau de l’espérance

Tsy misy rahona tsy hisava, tsy misy haizina tsy hazava”, cette exhortation nous renforce dans notre conviction qu’aucune obscurité n’est infranchissable. Universités, syndicats, société civile, citoyens doivent s’entraider pour donner corps aux médias et aux informations qu’elles traitent et fournissent – non comme marchandises mais comme biens communs. En ce jour de la liberté de la presse, prenons conscience qu’il faut lutter et œuvrer ensemble pour une information libre et indépendante, condition sine qua non d’un vivre-ensemble démocratique voué pour le développement de l’Homme.

 

Antananarivo, le 03 mai 2025

ILONTSERA

Observatoire des Médias et de la Communication à Madagascar

Media Matters Madagascar