COMMUNIQUÉ SUR LA JOURNEE MONDIALE DE LA LIBERTE DE LA PRESSE

A l’occasion de ce 3 mai 2017, Journée mondiale de la Liberté de la presse, ILONTSERA- Observatoire des médias et de la communication à Madagascar appelle le monde de la presse malgache à une humble et profonde réflexion quant à l’état réel de cette liberté dans le pays. Au-delà des célébrations officielles et des réjouissances d’usage, cette date doit nous inciter à un instant de recul, un moment d’introspection, et répondre en notre for intérieur, dans la plus grande honnêteté: à quoi sert notre presse actuellement ? Ou plutôt, qui/à qui sert-elle réellement ? Où en est-elle dans sa mission d’éducation citoyenne et de pourvoyeur de connaissances ? Bref, en quoi notre presse nous est-elle bénéfique en matière de développement, celui juste, équitable, durable ?

            Le thème de cette année nous incite d’autant plus à cette auto-(psych)analyse: « Des esprits critiques pour des temps critiques – Le rôle des médias dans la promotion de sociétés justes, pacifiques et inclusives ». Des sujets qui touchent plus que jamais les Malgaches à l’heure des profondes ruptures sociétales, des phénomènes de vindict populaire, de viol, d’insécurité urbaine et rurale, de rumeur, de « fake news » et de bonimenteurs en tout genre. A l’heure aussi des réseaux sociaux, espace de liberté et d’expression par excellence, mais qui, sans une démarche préalable dont l’Education aux médias, ne sera qu’un outil d’exclusion, de fracture, de haine, de violence et de dictature.

            Quel est notre rôle et nos responsabilités pour et dans cette société quand on se met désormais à attaquer et à violer des « religieux », à attiser les conflits religieux pour des enjeux inavoués? Où est notre redevabilité sociale quand la corruption et l’autocensure (parfois douloureuse) sont devenues les règles dans la profession de journaliste et dans les médias, à quelques exceptions près ? L’on dit que souvent la presse est le miroir d’une société. Dans notre cas, une société devenue sans repère, cupide et corrompue, où la majorité vit noyée dans la précarité et la dureté du quotidien. A qui la faute ? Point de bouc émissaire car l’heure est grave. A chaque niveau, l’Etat, l’armée, les médias, les journalistes, l’Ordre des Journalistes de Madagascar (OJM), les Organisations de la Société civile (OSC), les citoyens : tous responsables.

            L’on est ainsi en droit de beaucoup espérer du « nouveau » Ministre de la communication et des relations avec les institutions qui promet de rouvrir les dialogues sur le Code de la Communication Médiatisée tant décrié, afin d’ « instaurer un climat plus serein et apaisé dans le milieu médiatique et journalistique surtout à l’approche des élections ». Au-delà du Code, plusieurs problématiques devraient être également abordées dont l’éthique, la déontologie, la moralité, la responsabilité sociétale de la presse, la précarité du métier, l’avènement d’une culture médiatique locale, les nouveaux modèles économiques des médias, les réalités numériques, etc.

            Cet espace de dialogue ne serait dès lors que le bienvenu et ne devrait chômer vu l’ampleur de la tâche. Mais à condition qu’il soit suivi d’actions et de résultats avec la garantie d’une inclusivité totale, d’une entière liberté d’expression et de critique constructive et surtout d’une vraie volonté politique. Il exigera vigilance de la part des acteurs. L’objectif commun étant d’aboutir à un Code de la Communication Médiatisée moins liberticide à l’heure où la transparence, l’accès à l’information et la liberté d’expression deviennent les normes mondiales en matière de presse et de démocratie. En attendant, ILONTSERA encourage la presse à toujours faire montre de professionalisme, d’engagement et d’honnêteté dans la recherche de la vérité, en toute âme et conscience.

Fait à Antananarivo, le 3 mai 2017

ILONTSERA

Ivom-pandalinana ny Tontolon’ny Serasera marolafika eto Madagasikara

Observatoire des Médias et de la Communication à Madagascar

Media Matters Madagascar